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L'assembleur en ligne

Avec le langage C et le compilateur GCC

Ce tutoriel va vous présenter l'assembleur en ligne avec le langage C et le compilateur GCC.

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I. Introduction

Aujourd'hui, le langage assembleur est assez peu utilisé. La plupart des programmeurs utilisent les langages haut niveau, comme le C ou le C++, pour plusieurs raisons. En premier lieu, parce que ces langages permettent d'écrire des programmes indépendants de l'architecture, et donc portables. En second lieu, parce qu'ils présentent des syntaxes simples et compréhensibles, ce qui permet d'augmenter la productivité, lors de l'écriture et la maintenance du code. Mais, de temps en temps, les programmeurs ont besoin d'utiliser des instructions assembleur dans leurs programmes.

L'assembleur en ligne, Inline Assembly, est une extension des langages de programmation haut niveau standard offerte par certains compilateurs. Il permet d'inclure des instructions assembleur dans un programme écrit en langage haut niveau.

Ce tutoriel va vous présenter l'assembleur en ligne avec le langage C et le compilateur GCC. Les différents exemples cités sont téléchargeables sur Developpez.com.

I-A. Remerciements

Merci à Cédric Duprez et f-leb pour leur relecture minutieuse.

II. Quand utiliser l'assembleur en ligne ?

L'ajout des instructions assembleur dépendantes de l'architecture à un programme écrit dans un langage haut niveau affecte sa portabilité. Ainsi, vous ne devriez utiliser des instructions assembleur qu'en dernier ressort. Par exemple, lorsque vous constatez que l'utilisation de l'assembleur va optimiser vos codes et vous produira un programme rapide, ou lorsque vous voulez utiliser des instructions spécifiques à l'architecture et non descriptibles par une syntaxe de haut niveau.

En fait, la capacité d'optimisation des compilateurs est limitée à cause de plusieurs facteurs, tels que leur compréhension limitée du comportement du code, et le contexte dans lequel il sera utilisé, et aussi le besoin des programmeurs d'effectuer la compilation rapidement. En effet, la tâche d'optimisation est coûteuse en mémoire et en temps de compilation. Ainsi, la substitution des parties complexes du code et sensibles à la performance du programme par des simples instructions assembleur va simplifier l'optimisation d'une part, et permettra de produire un programme performant et rapide, d'autre part.

En outre, plusieurs fonctionnalités des processeurs sont encore difficiles à décrire par une syntaxe de haut niveau. Ainsi, plusieurs instructions machine doivent être écrites à la main. Parmi celles-ci, on cite les instructions système d'accès aux ports d'entrée/sortie (x86 : instructions OUT, OUTS, IN, INS). On peut aussi citer les instructions de gestion de la mémoire (x86 : LLDT, LGDT…) et des tâches (x86 : LTR).

L'utilisation des instructions assembleur nécessite une connaissance avancée de l'architecture et du fonctionnement interne du compilateur. En effet, l'assembleur en ligne est largement utilisé par les développeurs des systèmes d'exploitation et des pilotes de périphériques (drivers).

Dans ces domaines de programmation, la portabilité d'un code n'est pas une exigence extrême et n'a parfois pas de sens. En effet, le code source d'un driver ou d'un système d'exploitation ne pourra jamais être portable. La haute priorité est, souvent, donnée à la production d'un programme performant qui s'exécute rapidement et qui permet d'exploiter efficacement toutes les fonctionnalités d'une architecture donnée.

Pour les systèmes d'exploitation, le terme multiplate-forme est plus précis. Par exemple, le système Linux est multiplate-forme parce qu'il peut tourner sur une variété d'architectures. En fait, dans le code source de son noyau, chaque architecture possède sa propre description en langage C et en assembleur (/usr/src/linux/arch/). Cela vient du fait que les instructions et les caractéristiques diffèrent d'une architecture à une autre. Autrement dit, le code source dépendant d'une architecture ne peut pas être compilé pour tourner sur une autre.

Les instructions assembleur sont souvent encapsulées dans des macros ou des fonctions en ligne définies dans des fichiers d'en-tête. C'est pour faciliter la maintenance du code source et pour faciliter son portage d'une architecture à une autre. Consultez le répertoire /usr/src/linux/arch/x86/include/asm pour avoir accès à des exemples de code contenant des instructions assembleur x86. Par exemple, le fichier io.h contient les instructions x86 d'accès aux ports d'entrée/sortie. En outre, le fichier string.h contient l'implémentation des opérations de manipulation des chaînes en utilisant le jeu d'instructions x86.

Dans ce tutoriel, on va étudier quelques exemples des codes assembleur pris du code source du noyau Linux 0.01. Vous pouvez le télécharger sur https://www.kernel.org/pub/linux/kernel/Historic.

III. L'assembleur en ligne avec le langage C

En particulier, le compilateur GCC, GNU Compilers Collection dispose d'une syntaxe simple et complète permettant d'utiliser efficacement des instructions assembleur dans un programme C.

Dans un programme assembleur classique, chaque instruction possède, typiquement, deux opérandes : un opérande source et un opérande destination. Ces opérandes peuvent être utilisés de façon explicite ou implicite. On peut citer comme exemple l'instruction x86 MOV, qui utilise explicitement deux opérandes. En utilisant la syntaxe AT&T, on peut écrire cette instruction comme suit :

 
Sélectionnez
MOV source, destination

Les opérandes peuvent être de trois types : registre, mémoire ou immédiat. Dans l'exemple ci-dessous, l'instruction MOV va transférer le contenu du registre EDX dans EAX :

 
Sélectionnez
MOV EDX, EAX

Avec l'assembleur en ligne, on ne va pas réinventer la roue, croyez-moi ! Les instructions seront écrites de la même façon, sauf que les opérandes seront définis séparément et leurs valeurs pourront être des expressions C. Autrement dit, tout ce que vous avez appris sur l'assembleur restera valide et vous en aurez besoin. Vous allez juste apprendre une syntaxe qui vous permettra d'écrire des instructions assembleur dans un programme C.

Avec le compilateur GCC, les instructions assembleur, ainsi que la définition de leurs opérandes, doivent être encapsulées dans une construction déclarée, typiquement, avec le mot clé asm. Cela va indiquer au compilateur que le code à l'intérieur doit être traité d'une façon différente. Pendant la compilation, le compilateur GCC va utiliser les informations incluses dans la construction asm pour générer les instructions assembleur et les placer dans le code-cible.

Notez bien que GCC utilise par défaut la syntaxe AT&T pour générer le code-cible. En effet, le compilateur utilise, par défaut, le programme as (GNU Assembler) pour générer le code objet. Ainsi, dans la construction asm, les instructions assembleur doivent être écrites en utilisant cette syntaxe, à moins que vous n'utilisiez l'option -masm du compilateur. Dans ce qui suit, on va utiliser la syntaxe AT&T. Voici un tutoriel qui va vous aider à l'apprendre rapidement :

http://asm.developpez.com/cours/gas/

IV. Syntaxe de la construction asm

Le mot clé asm doit être suivi par une expression entre parenthèses et constituée de sections séparées par deux points. La première section contient des instructions assembleur écrites entre guillemets. Dans la deuxième, on doit spécifier les opérandes de sortie des instructions. La troisième section contient les opérandes d'entrée. La quatrième section sert à déclarer les modifications apportées, sur les registres ou en mémoire, par les instructions.

Important : vous devez toujours placer les deux points qui séparent la deuxième section de la troisième, même si la section de sorties est vide.

Le programme suivant utilise l'instruction assembleur movl pour affecter la valeur de la variable b à variable a (a = b ;) :

Listing 1 : movl.c
Sélectionnez
#include <stdio.h>
int main(void)
{
 int a = 10;
 int b = 5;

 __asm__("movl\t%1, %0"

         : "=&r" (a) : "r" (b)
         : /* liste des modifications */
        );

 printf("a = b = %d \n", a);
 return 0;
}

Ici, chaque opérande est écrit comme une expression C placée entre parenthèses et précédée d'une chaîne de caractères indiquant sa contrainte. La lettre r dans chaque contrainte symbolise le nom d'un registre général du processeur. Ainsi, le compilateur GCC va allouer un registre de ce type, pour stocker la valeur (5) de la variable b, et un autre pour stocker celle (10) de a. Le caractère « = » dans la contrainte « =r » du premier opérande indique que c'est un opérande de sortie. Toutes les contraintes des opérandes de sortie doivent commencer par « = ».

Note : le caractère « & » dans la première contrainte va indiquer au compilateur de ne pas allouer le même registre pour les deux opérandes. L'utilisation de ce caractère dans l'exemple ci-dessus n'est pas obligatoire, mais dans certains cas il est très important. On va expliquer, en détail, son utilisation dans la section IV.E Déclaration des modifications.

Pour se référer aux opérandes dans le code assembleur, on peut écrire leurs indices précédés du caractère « % ». Ainsi, l'instruction movl va transférer le contenu (5) du deuxième opérande (source ou entrée d'indice 1) dans le registre alloué au premier opérande (destination ou sortie d'indice 0).

Important : la production de sorties aura lieu, toujours, après l'exécution de la dernière instruction du code assembleur.

Dans le code ci-dessus, après l'exécution de l'instruction movl, la sortie a sera produite. C'est en affectant le contenu du registre destination à la variable a.

GCC ne peut pas analyser les instructions assembleur et vérifier si elles sont valides ou non. Ainsi, il ne peut pas vérifier si le type des opérandes est raisonnable pour les instructions ou non. En fait, c'est le rôle de l'assembleur as. En ce qui concerne la construction asm, GCC va juste, dans un premier temps, vérifier la syntaxe des expressions C utilisées comme opérandes. Ensuite, il va générer les opérandes des instructions en utilisant les informations contenues dans les sections d'entrées et de sorties. Finalement, il va placer les instructions assembleur avec leurs opérandes dans le code-cible.

Enfin, pour obtenir le code-cible produit par le compilateur GCC, faites-lui passer l'option -S. Faites passer, également, l'option -O2, pour appliquer le deuxième niveau d'optimisation de GCC à votre code. Voici une portion du code-cible de l'exemple ci-dessus :

 
Sélectionnez
        movl        $5, %edx
        movl        %esp, %ebp
        .cfi_def_cfa_register 5
        andl        $-16, %esp
        subl        $16, %esp
#APP
# 9 "movl.c" 1
        movl        %edx, %eax
# 0 "" 2
#NO_APP
        movl        $.LC0, (%esp)
        movl        %eax, 4(%esp)
        call        printf
        xorl        %eax, %eax
        leave

Dans le code-cible, le bloc asm est placé entre les deux lignes de commentaires #APP et #NO_APP. Le compilateur a alloué deux registres généraux pour stocker les valeurs de a et b : le registre EAX pour a et le registre EDX pour b.

IV-A. Les instructions assembleur

La première section de la construction asm contient les instructions assembleur. Dans cette section, vous devez spécifier un modèle d'instructions assembleur, un peu comme ce qui apparaît dans une description machine (un fichier .s).

En utilisant la syntaxe AT&T, si vous voulez utiliser le nom d'un registre comme opérande, préfixez-le par « %% ». Pour se référer à un opérande d'entrée ou de sortie, dans une instruction assembleur, écrivez le caractère « % » suivi de son indice (0, 1… 29).

Comme dans un code assembleur classique, les instructions de asm doivent être séparées par des séparateurs. En assembleur GNU, on a le choix d'utiliser soit le caractère « ; », soit le caractère saut de ligne. Si vous choisissez ce dernier, placez « \n » après chaque instruction, sauf la dernière.

Notez que vous pouvez mettre plusieurs instructions dans la même chaîne, en les séparant par des « ; », comme suit :

 
Sélectionnez
__asm__("\tnop;nop;nop\t"
        "jmp \t1f\n"
        "1:" ::);

Le « \n » sera traduit en un saut de ligne dans le code-cible. Le caractère « \t » est optionnel et il sera traduit en une tabulation.

Pendant la compilation, GCC utilise les informations (sur les opérandes) contenues dans les sections d'entrées et de sorties pour générer les opérandes des instructions assembleur.

IV-B. Les opérandes

Chaque opérande peut être écrit comme une expression C placée entre parenthèses et précédée d'une chaîne de caractères indiquant sa contrainte. En général, les instructions assembleur utilisent trois types d'opérandes : les opérandes registre, les opérandes mémoire et les opérandes immédiats. Dans la construction asm, les contraintes vont préciser si un opérande doit être stocké dans un registre, et quel type de registre ; si l'opérande doit être une référence dans la mémoire, et quel type d'adresse utilisé ; si l'opérande est une constante immédiate, et quelle valeur elle peut avoir. Une contrainte peut être constituée d'un ou plusieurs modificateurs et lettres.

IV-B-1. Les lettres

Les lettres spécifient souvent les registres d'une architecture donnée. Le tableau suivant liste les lettres couramment utilisées avec l'architecture x86 :

Lettre

Registre

R

EAX, EBX, ECX, EDX, ESI, EDI, ESP et EBP

q

EAX, EBX, ECX, EDX (mode 32 bits)

a

Registre EAX

b

Registre EBX

c

Registre ECX

d

Registre EDX

S

Registre ESI

D

Registre EDI

A

Combinaison EAX:EDX

Il existe aussi un ensemble de lettres commun à toutes les architectures. Consultez le manuel de GCCcette adresse) pour avoir accès à la liste complète de contraintes.

Avec l'architecture x86, on utilise souvent la contrainte « r » ou « R » pour spécifier un opérande registre, la contrainte « m » pour spécifier un opérande mémoire et la contrainte « i » ou « I » pour spécifier un opérande immédiat.

En outre, un nombre (0, 1, 2… 9) peut être utilisé dans la contrainte d'un opérande d'entrée, pour dire que cet opérande fait référence à un opérande de sortie. Ainsi, le compilateur va allouer la même location pour stocker les valeurs des deux opérandes.

IV-B-2. Les modificateurs

Pour les modificateurs, on a déjà vu le modificateur « = ». Il en existe cinq autres, parmi lesquels on cite les modificateurs « + » et « & ». Le premier indique que l'opérande est en écriture et en lecture à la fois. Le modificateur « & » a une utilisation spécifique, qu'on va expliquer dans les sections suivantes.

IV-C. Les sorties

La deuxième section de la construction asm contient les opérandes de sortie, séparés par des virgules. Chaque opérande doit être une expression C de type lvalue. C'est-à-dire qu'on peut le mettre à gauche d'une affectation. Par exemple, vous ne devez pas utiliser une constante déclarée avec la directive #define ou une variable C de type const comme opérande de sortie. Le compilateur vérifie cela pour chaque opérande de sortie.

Un opérande de sortie ordinaire est en écriture seulement. Ainsi, les contraintes de sortie contiennent, souvent, le modificateur « = ». La valeur d'un tel opérande reste indéterminée jusqu'à la production des sorties ! Vous pouvez vérifier cela dans l'exemple movl.c, en inversant l'ordre des opérandes de l'instruction comme suit :

 
Sélectionnez
__asm__("movl\t%0, %1"

        : "=&r" (a)
        : "r" (b)
        :/* liste des modifications */
       )

Ainsi, si vous décidez d'utiliser un opérande de sortie en lecture et en écriture, vous devez utiliser le modificateur « + » à la place de « = ».

IV-D. Les entrées

Les opérandes d'entrée occupent la troisième section de la construction asm. Ils sont traités de manière différente de celles de sortie, bien qu'ils aient la même syntaxe.

Contrairement aux opérandes de sortie, un opérande d'entrée est par défaut en lecture et en écriture (sans utiliser le « + »). Ainsi, vous pouvez spécifier une même location (registre ou mémoire) comme opérandes de sortie et d'entrée à la fois. La connexion entre les deux opérandes doit être décrite par une contrainte disant que les deux opérandes doivent occuper la même location à l'exécution de l'instruction correspondante. Notez qu'on peut utiliser la même expression C pour les deux opérandes, comme on peut utiliser deux expressions différentes. Pour illustrer, prenons l'exemple suivant :

 
Sélectionnez
__asm__( "addl %2, %1" : "=r" (a) : "0" (a), "r"(b));

La contrainte « 0 » dans le premier opérande d'entrée (d'indice 1) dit que l'expression C doit occuper le même registre général que celui spécifié dans l'opérande de sortie (d'indice 0).

Important : un nombre n'est autorisé comme contrainte que dans un opérande d'entrée et il doit se référer à un opérande de sortie.

Seul un nombre dans une contrainte peut garantir que deux opérandes vont occuper la même location. L'utilisation de la même expression dans les deux opérandes ne suffit pas. Ainsi, le résultat du code suivant n'est pas fiable :

 
Sélectionnez
__asm__( "addl %2, %1" : "=r" (a) : "r" (a), "r"(b));

En fait, Le compilateur peut choisir deux registres généraux différents pour stocker les deux opérandes 0 et 1.

IV-E. Déclaration des modifications

Si une instruction modifie (explicitement ou implicitement) les valeurs d'un ou plusieurs registres, spécifiez ces registres dans la quatrième section de la construction asm. Les registres modifiés sont décrits dans des chaînes de caractères séparées par des virgules. Dans l'exemple suivant, la valeur du registre EBX est modifiée par l'instruction movl. Donc, on doit écrire son nom dans la section 4 de la construction asm :

Listing 2 : appel sys.c
Sélectionnez
#include<asm/unistd.h>             /* __NR_write */
#include<unistd.h>                 /* STDOUT_FILENO */
#include<string.h>                 /* strlen() */

#define STDOUT STDOUT_FILENO

int main(void)
{
 char msg[] = "hello!\n";
 int res;

 __asm__("movl \t%2, %%ebx\n\t"
         "int \t$0x80"

         :"=a" (res)
         :"0" (__NR_write), "I" (STDOUT),
          "c" (msg), "d" (strlen(msg))
         :"ebx");

return 0;
}

L'instruction assembleur int utilise, implicitement, les registres EAX, EBX, ECX et EDX. Le registre ECX contient l'adresse du premier caractère de la chaîne msg, et EDX contient sa taille. Le registre EAX est utilisé par l'instruction int comme opérandes d'entrée et de sortie à la fois. En tant qu'opérande d'entrée, il doit être initialisé avec la valeur numérique __NR_write. Ainsi, l'instruction int va générer l'appel système 4 (la fonction write() du fichier /usr/include/unistd.h), pour afficher le message « hello ! » sur la console. La valeur de retour de l'appel système sera stockée dans le registre EAX, en tant qu'opérande de sortie.

Important : vous ne devez jamais écrire le nom d'un registre dans la section de déclaration des modifications, si ce registre fait partie d'un opérande d'entrée ou de sortie.

En fait, un tel registre est, à l'avance, déclaré modifié. Dans l'exemple ci-dessus, les registres ECX (”c”), EDX (”d”) et EAX (”=a”) sont utilisés pour stocker les valeurs des opérandes d'entrée et de sortie. Donc, on n'a pas listé leurs noms dans la section 4 de la construction asm.

En utilisant les informations sur la modification des registres, le compilateur détermine les valeurs qui doivent être sauvegardées dans la pile et restaurées après l'exécution du bloc asm.

IV-E-1. Modification de la mémoire : « memory »

Si vos instructions assembleur accèdent à la mémoire d'une manière imprévisible et arbitraire, ajoutez « memory » à la liste des modifications. Cela va renseigner à GCC de ne pas maintenir les valeurs (destinées à être chargées dans la mémoire) stockées dans des registres et de ne pas optimiser l'accès à la mémoire, durant l'exécution des instructions. D'autre part, si vous connaissez la taille de la mémoire accédée, ajoutez-la comme entrée, sinon utilisez « memory ».

IV-E-2. Modification du registre code condition : « cc »

Si vos instructions assembleur peuvent modifier le registre de code condition cc d'une manière inhabituelle, ajoutez « cc »à la liste de modifications. Avec l'architecture x86, la notation cc est utilisée par GCC pour représenter le registre des indicateurs EFLAGS.

Certaines instructions de l'architecture x86, telles que celles de décalage et de rotation logique ou arithmétique, peuvent altérer quelques bits du registre EFLAGS pendant leur exécution. Pour illustrer, soit l'exemple suivant :

Listing 3 : shll.c
Sélectionnez
__asm__( "shll $2, %1" : "=r" (res) : "r" (a) : "cc");

Dans l'exemple ci-dessus, l'instruction shll (Logical Left Shift) décale les bits du registre deux positions vers la gauche. Le dernier bit (de gauche) décalé est transféré dans le bit CF (Carry Flag). Ainsi, le registre code condition (EFLAGS) est toujours modifié avant qu'on puisse le tester ! Donc, « cc » doit être placé dans la section 4 pour renseigner le compilateur. Par contre, le bit OF (Overflow Flag) sera modifié automatiquement par le processeur comme résultat de l'exécution de shll, ce qui n'est pas pris en compte par le compilateur comme modification du registre de code condition cc.

Les instructions de test TEST, de comparaison CMP, ainsi que les instructions de contrôle des indicateurs comme CLD et STD n'ont pas d'opérandes de sortie (comme shll). Ainsi, ils ne sont pas considérés par le compilateur comme modificateurs de registre cc.

IV-E-3. Le modificateur « & »

À moins qu'un opérande de sortie contienne « & » dans sa contrainte, GCC peut le stocker dans le même registre alloué à un opérande d'entrée qui ne lui fait pas référence. C'est parce que le compilateur GCC suppose toujours que les instructions assembleur finissent l'utilisation des opérandes d'entrée avant que les sorties soient produites. Or, dans certains cas, cette supposition est fausse, ce qui peut provoquer des problèmes. Ainsi, le programme suivant n'est pas fiable :

Listing 4 : addition2.c
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__asm__("movl %1, %%eax\n\t"
        "addl %2, %%eax\n\t"
        "subl %1, %1"
        :"=a" (res)
        :"r" (a), "b" (b));

Si le compilateur alloue le registre EAX au premier opérande d'entrée, le résultat de l'addition (contenu du registre EAX) sera modifié avant son chargement dans res. C'est parce que la production de sortie res aura lieu juste après l'exécution de l'instruction subl ! Voici une portion du code-cible du programme ci-dessus :

 
Sélectionnez
        movl        $3, %edx
        movl        $10, %eax
#APP
# 9 "addition2.c" 1
        movl         %eax, %eax
        addl         %edx, %eax
        subl         %eax, %eax
# 0 "" 2
#NO_APP

Seule l'utilisation du modificateur « & », dans la contrainte de l'opérande de sortie, va prévenir l'allocation du registre EAX à l'opérande d'entrée.

Dans l'exemple ci-dessus, l'utilisation de « 0 » comme contrainte du premier opérande d'entrée n'est pas correcte. C'est parce qu'il est utilisé par l'instruction subl, en tant qu'opérande d'entrée, avant la production de la sortie res. Par contre, dans l'exemple suivant, l'utilisation de la contrainte « 0 » est correcte :

Listing 5 : multiplication.c
Sélectionnez
#include <stdio.h>

int main(void)
{
 int x = 10;             /* EAX */
 int mult = 3;
 int res;                /* EAX */

 __asm__("movl %2, %%ebx\n\t"
         "imul %%ebx"
         :"=&a" (res)
         :"0" (x), "r" (mult)
         :"ebx");

 printf("%d * %d = %d \n", x, mult, res);
 return 0;
}

L'instruction imul utilise implicitement le registre EAX pour stocker le nombre à multiplier (comme entrée) et pour stocker le résultat de la multiplication. Ainsi, le premier opérande d'entrée est utilisé seulement avant la production de la sortie res. Voici un autre exemple montrant l'importance du modificateur « & » dans quelques cas :

Listing 6 : division.c
Sélectionnez
#include <stdio.h>

int main(void)
{
 int x = 10;           /* EAX */
 int divs = 3;
 int quot;             /* EAX */
 int reste;            /* EDX */

 __asm__("subl %%edx, %%edx\n\t"
         "movl %3, %%ebx\n\t"
         "idivl %%ebx"

         :"=a" (quot), "=&d" (reste)
         :"0" (x), "r" (divs)
         :"ebx");

 printf("%d / %d = %d \n", x, divs, quot);
 printf("%d %% %d = %d \n", x, divs, reste);
 return 0;
}

L'instruction idivl utilise implicitement le registre EAX pour stocker le dividende (x) et le quotient (quot). Le registre EDX sera utilisé implicitement pour stocker le reste (reste) de la division. Ainsi, le registre EDX doit être indiqué dans la deuxième contrainte de sortie.

Supposons qu'on n'ait pas utilisé l'identificateur « & » dans la deuxième contrainte. Dans ce cas, le compilateur peut allouer le registre EDX pour stocker le diviseur (divs). Et par conséquent, l'exécution du programme peut provoquer une exception de type division par 0 !

Ainsi, lorsque le nom d'un registre est indiqué comme contrainte de sortie, il vaut mieux d'utiliser le modificateur « & ».

V. Problèmes d'optimisation

Durant l'optimisation, GCC tente de réordonner et de réécrire le code du programme, même en présence de la construction asm. Si les opérandes de sortie ne sont pas utilisés (la section 2 de asm est vide), ou si leurs valeurs ne sont pas modifiées par les instructions, l'optimiseur considère que les instructions n'ont pas un effet de bord dans le programme. Ainsi, la construction asm peut être supprimée. Pour bien comprendre le problème, on va étudier la portion de code suivante, prise du fichier include/string.h du code source du noyau Linux-0.01) :

 
Sélectionnez
extern inline char *strcpy(char *dest,const char *src)
{

 __asm__("cld\n"
         "1: lodsb\n\t"
         "stosb\n\t"
         "testb %%al,%%al\n\t"
         "jne 1b"
         ::"S" (src), "D" (dest)
         :"ax", "memory");
 return dest;
}

La construction asm du code ci-dessus ne possède pas d'opérande de sortie. Pour le moment, on n'a pas besoin d'utiliser de sortie puisque les instructions lodsb et stosb utilisent directement la mémoire. Ainsi, on n'a pas de résultat à récupérer depuis un registre dans la mémoire à la fin de l'exécution du bloc asm. Mais l'optimiseur est parfois fou ! L'optimisation risquera de supprimer la construction asm. Et, par conséquent, la fonction strcpy() devient inutilisable.

Vous pouvez empêcher la construction asm d'être supprimée, par l'utilisation du mot-clé volatile, qui va indiquer au compilateur que les instructions ont un effet de bord important. GCC ne supprime jamais un asm volatile. Mais il peut le déplacer dans le code. Pour éviter ça, vous devez toujours spécifier tout opérande modifié dans le code assembleur, comme opérande de sortie. Ainsi :

 
Sélectionnez
extern inline char *strcpy(char *dest,const char *src)
{
 int S, D, A;

 __asm__ __volatile__(
         "cld \n"
         "1:lodsb \n\t"
         "stosb \n\t"
         "testb %%al, %%al \n\t"
         "jne 1b"

         :"=&S (S)", "=&D (D)", "=&a (A)"
         :"0" (src),"1" (dest), "2" (0));
 return dest;
}

Dans l'exemple ci-dessus, le contenu des registres ESI, EDI et EAX a été modifié. Ainsi, on les a spécifiés comme opérandes de sortie. Les variables S, D et A déclarées dans le code C sont utilisées juste pour créer une dépendance avec le bloc asm. Ainsi, l'optimiseur ne déplacera pas ce dernier.

VI. Utilisation des macros

Si vous décidez d'utiliser des instructions assembleur dépendantes de l'architecture, il vaut mieux pour vous les encapsuler dans des macros et les placer dans un fichier d'en-tête. Cela peut vous aider à la maintenance de vos programmes. Ainsi, si vous décidez de porter un programme vers une autre architecture, vous n'aurez besoin de réécrire qu'un seul fichier. Dans l'exemple max.c, on a encapsulé la construction asm dans la macro max(a,b) définie dans le fichier d'en-tête max.h :

Listing 7 : max.h
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#ifndef MAX_H
#define MAX_H

#define max(a,b)                      \
({                                    \
 int __res, __x = (a), __y = (b);     \
 __asm__ __volatile__(                \
        "cmpl %1, %2\n\t"             \
        "jge 1f\n\t"                  \
        "movl %1, %0\n\t"             \
        "jmp 2f\n\t"                  \
        "1: movl %2, %0\n\t"          \
        "2:"                          \
        :"=r" (__res)                 \
        :"r" (__x), "r" (__y));       \
 __res;                               \
})

#endif

Notez que la dernière instruction d'une instruction composée, écrite entre « {} », doit être une expression suivie par « ; ». Elle sert à donner une valeur à l'instruction entière. Dans notre exemple, on veut récupérer la valeur de l'opérande de sortie dans le code C, pour l'afficher par exemple. Ainsi, on a écrit __res ; à la fin de l'instruction composée.

Dans la définition de la macro max(a,b), les variables __x et __y sont utilisées pour s'assurer que la construction asm opère sur des valeurs entières. Une autre méthode pour faire en sorte que la construction asm opère sur le type de données correct est l'utilisation de forçage de type (casting) dans les entrées. Dans l'exemple ci-dessus, on peut forcer l'utilisation du type entier dans les opérandes d'entrée de la construction asm comme suit :

 
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(::"r" ((int)a), "r" ((int)b);

Pour le même objectif, les constructions asm peuvent être encapsulées dans des fonctions en ligne. La section suivante en donne un exemple.

VII. Un exemple détaillé

VII-A. Opérations sur les chaînes de caractères avec l'architecture x86

En bref, les instructions x86 de manipulation des chaînes des caractères, comme lodsb et stosb, utilisent implicitement les registres ESI et EDI. ESI doit contenir l'adresse, dans le segment DS, de la chaîne source, et EDI doit contenir celle, dans le segment ES, de la chaîne de destination. Le registre EAX est utilisé implicitement par ces instructions pour stocker temporairement les données traitées. L'instruction cld va mettre à 0 le bit DF (Direction Flag) du registre EFLAGS. Ainsi, ESI et EDI seront incrémentés par le processeur durant l'exécution des instructions. A contrario, l'instruction std est utilisée pour mettre à 1 le bit DF, et ainsi ESI et EDI seront décrémentés.

Le programme string.c utilise les deux fonctions en ligne my_strcpy et my_strcmp définies dans le fichier string.h. La première fonction va initialiser une chaîne de caractères ; la deuxième va comparer deux chaînes initialisées et retourner 0 si elles sont égales, sinon elle retourne -1 ou 1.

Listing 8 : string.c
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#include <stdio.h>
#include <stdlib.h>
#include "string.h"

#define  TAILLE 10

int main (void)
{
 char * str1 = (char*)
        malloc(TAILLE*sizeof(char));
 char * str2 = (char*)
        malloc(TAILLE*sizeof(char));

 if(!str1 || !str2)
        return EXIT_FAILURE;

 my_strcpy((char*)"foo", str1);
 my_strcpy((char*)"bar", str2);

 if(!my_strcmp(str1, str2))
        printf("Les deux chaines \"%s\" et \"%s\" "\
          "sont egales.\n", str1, str2);
 else
        printf("Les deux chaines \"%s\" et \"%s\" "\
          "ne sont pas egales.\n", str1, str2);

 free (str1);
 free (str2);

 return EXIT_SUCCESS;
}

VII-B. La fonction my_strcpy

 
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static inline void
my_strcpy(char * src, char * dest)
{
 int S, D, A;

 __asm__ __volatile__ (
        "cld\n\t"               /* ESI++, EDI++ */
        "1:\tlodsb\n\t"         /* MOVB DS:ESI, AL */
        "stosb\n\t"             /* MOVB AL, ES:EDI */
        "testb\t%%al,%%al\n\t"  /* ZF=1 si AL == 0 */
        "jne\t1b"               /* JMP si ZF == 0 */

        :"=&S" (S),"=&D" (D), "=&a" (A)
        :"0" (src),"1" (dest), "2" (0)
        :"memory");
}

Dans le code assembleur, on a utilisé l'instruction cld. Donc, ESI et EDI doivent contenir les adresses src et dest du premier caractère de chaque chaîne.

En outre, les instructions lodsb et stosb accèdent à la mémoire (src et dest) d'une manière imprévisible. En effet, on ne connaît pas à l'avance le nombre d'octets (caractères) à copier. Donc, on a utilisé « memory ».

D'autre part, les trois registres ESI, EDI et EAX seront modifiés par les instructions assembleur, donc on les a spécifiés comme opérandes de sortie. Ainsi, on doit utiliser le modificateur « & » pour prévenir l'allocation de ces registres à une entrée non correcte. La connexion entre les entrées et les sorties aura lieu avec l'utilisation des contraintes « 0 », « 1 » et « 2 ». Cela est autorisé parce que les sorties S, D et A seront produites après la consommation des entrées par les instructions. Elles sont utilisées juste pour créer une dépendance entre le code C et le bloc asm !

L'utilisation du mot clé volatile et des opérandes de sortie va prévenir la suppression ou le déplacement de la construction asm pendant l'optimisation.

VII-C. La fonction my_strcmp

La fonction my_strcmp est aussi extraite du fichier include/string.h du code source du noyau Linux-0.01. Son fonctionnement est similaire à celui de la fonction strcmp de la bibliothèque C standard, définie dans le fichier /usr/include/string.h.

 
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static inline int
my_strcmp(const char * str1,const char * str2)
{
 int S, D, __res;

 __asm__ __volatile__(
        "cld\n"                /* ESI++, EDI++ */
        "1:\tlodsb\n\t"        /* MOV DS:ESI, AL */
        "scasb\n\t"            /* SUB ES:ESI, AL */
        "jne 2f\n\t"           /* JMP si ZF == 0 (ES:EDI != AL) */
        "testb %%al,%%al\n\t"  /* ZF=1 si AL == 0 */
        "jne 1b\n\t"           /* JMP si ZF == 0 => il y a encore des caracteres */
                               /* pour comparer */
        "xorl %%eax,%%eax\n\t" /* (str1 == str2) => __res = 0 */
        "jmp 3f\n"             /* on a termine ! */
        "2:\tmovl $1,%%eax\n\t"
        "jl 3f\n\t"            /* (str1 != str2) et (str1[i] > str2[i]) => __res = 1 */
        "negl %%eax\n"         /* (str1 != str2) et (str1[i] < str2[i]) => __res = -1 */
        "3:"

        :"=&D" (S), "=&S" (S),"=&a" (__res)
        :"0" (str1),"1" (str2), "2" (0)
        :"memory");

 return __res;
}

VII-D. La compilation avec GCC

Voici le makefile utilisé pour compiler le programme string.c :

 
Sélectionnez
CFLAGS = -O2 -fomit-frame-pointer -W -Wall

string: string.o
        cc string.o -o string

string.o: string.c string.h
        cc -c $(CFLAGS) string.c -o string.o

clean:
        rm -rfv string.o

O2 est le niveau d'optimisation recommandé. Le compilateur va essayer d'augmenter les performances sans compromettre la taille et sans prendre trop de temps en compilation. Ce niveau d'optimisation permet de produire un code rapide. L'option -fomit-frame-pointer permet aussi de produire un code rapide et de taille réduite. Consultez le manuel de GCC pour avoir accès à encore plus d'informations.

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